Quand on réfléchit aux dangers potentiels pour nos investissements financiers, on pense spontanément à la crise économique, l’inflation galopante ou les politiques des banques centrales. Mais comme le souligne très justement Xavier Delmas dans sa vidéo sur YouTube, le vrai danger pourrait en fait résider dans notre tendance naturelle à passer un temps disproportionné sur des détails insignifiants, tout en ignorant les véritables enjeux.
Qu’est-ce que la loi de la futilité de Parkinson ?
Décrite pour la première fois en 1957 par Cyril Northcote Parkinson, cette loi explique que le temps consacré à une décision est inversement proportionnel à son importance réelle. Autrement dit, plus un sujet est simple et facile à comprendre, plus il génère de débats inutiles.
Xavier Delmas reprend dans sa vidéo l’exemple célèbre de Parkinson : un comité réuni pour valider deux projets, l’un extrêmement technique (un réacteur nucléaire), l’autre simple (un abri à vélos). Le comité valide le projet complexe très rapidement, parce que personne ne veut sembler incompétent en posant des questions basiques. En revanche, il passe énormément de temps à débattre du projet simple (couleur, taille, emplacement de l’abri à vélos), car chacun se sent légitime à donner son avis.
Pourquoi nous tombons tous dans ce piège ?
Ce phénomène est profondément humain. Nous préférons naturellement les sujets accessibles où nous nous sentons compétents. Ainsi :
- Nous passons beaucoup de temps à choisir la couleur d’une voiture mais peu à analyser sa fiabilité ou ses coûts d’entretien.
- Nous discutons des heures sur un logo d’entreprise, mais évitons de nous pencher sérieusement sur une mutation technologique complexe, bien plus cruciale pour l’avenir de cette même entreprise.
Xavier Delmas rappelle que ce phénomène est largement observé en finances comportementales : une étude récente menée au Vietnam montre que les investisseurs individuels sont beaucoup plus influencés par les réseaux sociaux que par l’analyse sérieuse des fondamentaux économiques des entreprises dans lesquelles ils investissent.
Comment cela impacte-t-il nos finances personnelles ?
Cette tendance à la futilité a un coût réel sur notre patrimoine :
- En bourse, nous passons trop de temps à suivre les variations quotidiennes des cours et à lire des commentaires peu pertinents sur Twitter, au lieu d’analyser la santé financière d’une entreprise (cash-flow, modèle économique, résilience sur le long terme).
- Dans l’immobilier, nous critiquons aisément la décoration d’un appartement, mais négligeons souvent l’état de la toiture ou les défauts structurels, qui peuvent pourtant coûter beaucoup plus cher à long terme.
Comment éviter ce biais ?
La solution proposée par Xavier Delmas : établir systématiquement une checklist avant toute décision financière importante. Voici quelques questions pratiques à intégrer dans votre réflexion :
- Cette décision est-elle réversible ? Un appartement parisien peut se revendre facilement, un château dans une zone isolée beaucoup moins.
- Ai-je comparé sérieusement au moins trois alternatives ? Que ce soit pour l’achat d’un bien immobilier, d’une action en bourse ou d’un produit d’épargne.
- Suis-je influencé par les avis externes ou mes décisions sont-elles basées sur des faits objectifs ?
- Ai-je considéré tous les coûts cachés ? Maintenance, frais de gestion, taxes foncières…
- Suis-je en train de passer 3 heures sur un sujet à 200 euros et 3 minutes sur un sujet à 200 000 euros ?
Apprendre à mieux décider en bon père de famille
Prendre de bonnes décisions financières implique souvent de se confronter à une forme d’inconfort intellectuel. Le piège est justement là : préférer la simplicité d’une décision secondaire à la complexité d’un choix structurant.
Le rôle du « bon père de famille », en matière de gestion patrimoniale, consiste justement à identifier les véritables enjeux et à leur consacrer le temps nécessaire. Plutôt que de se perdre dans les détails futiles, il vaut mieux poser les bonnes questions, même les plus basiques, aux experts et vérifier rigoureusement les fondamentaux.
En somme, la loi de la futilité nous rappelle que la qualité d’une décision n’est pas liée au temps passé dessus, mais à la pertinence des critères que l’on choisit pour la prendre.