Parler d’argent avec ses proches qui n’ont rien demandé n’est jamais une tâche facile, surtout lorsqu’il s’agit de remettre en question leurs choix d’investissement. Il est délicat de leur expliquer que certains placements, qu’ils jugent sûrs ou qu’ils ont choisis sous les conseils d’un conseiller commercial, peuvent en réalité comporter des risques importants ou ne pas être optimisés. Pourtant, dans un contexte économique incertain, il devient essentiel d’aborder ces sujets, même si cela peut créer des tensions.
En revanche, lorsqu’un proche est en attente de conseils financiers, il est important de saisir cette opportunité pour lui donner des informations précises tout en précisant que c’est à lui de prendre la décision finale. Cela permet d’éviter toute responsabilité ou reproche ultérieur, surtout dans le cas de placements périlleux comme les cryptomonnaies ou d’autres investissements que les médias généralistes peuvent présenter comme sulfureux, parfois à raison.
La Confiance Aveugle dans le Conseiller Commercial
Il est fréquent que les proches préfèrent se fier aux conseils de leur conseiller commercial, même si celui-ci change régulièrement au sein de leur banque. Cette confiance repose souvent sur une habitude ou une perception d’autorité : le conseiller est perçu comme un expert de la finance, et il peut être difficile de remettre en cause son avis. Cependant, il est important de rappeler que les intérêts du conseiller ne sont pas toujours alignés avec ceux du client. La banque a, avant tout, un objectif commercial, qui n’est pas nécessairement celui d’optimiser les rendements ou de minimiser les risques pour ses clients.
En outre, certaines banques ont un historique de placements peu judicieux ou de conseils inadaptés. Mais, malgré cela, de nombreux épargnants restent réticents à explorer d’autres options, préférant la sécurité perçue de leur établissement actuel. Il est ainsi difficile de convaincre ses proches de remettre en question cette confiance aveugle, surtout lorsqu’il s’agit de décisions qui engagent leurs économies de manière importante.
Les Capitaux Propres des Banques : Une Réalité à Connaître
Un aspect souvent méconnu est le niveau réel de capitaux propres détenus par les banques, qui est largement inférieur à la valeur totale des placements gérés. En réalité, les banques ne disposent pas physiquement des sommes affichées sur les comptes des épargnants ; elles sont en grande partie investies ou utilisées pour d’autres opérations financières. Cela signifie qu’en cas de crise ou de défaut, les liquidités disponibles pour les épargnants peuvent être bien inférieures aux montants inscrits sur leurs comptes (de l’ordre de 8 à 10% du solde indiqué dans le meilleur des cas, soit 10 à 12 fois moins qu’indiqué sur les relevés)
Les faillites bancaires peuvent survenir du jour au lendemain, même pour des établissements considérés comme sûrs dans des pays réputés stables. L’exemple de Credit Suisse en 2023 montre que même des banques de premier plan peuvent se retrouver en difficulté, soulignant l’importance de ne pas se fier aveuglément à la réputation ou à la solidité perçue d’une banque.
Un Exemple Personnel : Une Mauvaise Recommandation ?
J’ai moi-même été confronté à une situation délicate concernant mes parents, clients d’une banque mutualiste depuis près de 60 ans. Âgés de près de 80 ans, ils se sont vu conseiller par leur conseillère commerciale de placer leur argent dans un Plan d’Épargne Logement (PEL), alors même qu’ils n’ont évidemment plus aucun projet immobilier à leur âge. Cette recommandation a été faite à un moment où l’inflation atteignait près de 10 %, rendant ce placement particulièrement inadapté. Plutôt que de par exemple leur proposer d’investir cet argent pour les études, l’entrée dans la vie active de leurs petits-enfants, de faire un placement via un « don Sarkozy », cette conseillère a probablement répondu à un objectif interne de l’établissement ou du siège, visant peut-être à obtenir un bonus personnel.
Ce qui est resté de cette action pour mes parents, c’est que « la conseillère était sympa ». Mon ressenti, en revanche, est tout autre : cela s’approche, selon moi, d’un abus de faiblesse. Proposer un tel produit financier à des personnes de cet âge, sans considération de leur situation familiale ou des opportunités plus adaptées, témoigne d’une approche qui priorise les objectifs commerciaux de la banque au détriment des intérêts de ses clients.
Protéger les Proches Sans Imposer Son Avis
L’un des défis majeurs lorsque l’on souhaite informer ses proches de manière constructive est de ne pas paraître condescendant ou insistant. Il est essentiel de trouver un équilibre entre partager ses connaissances et respecter leur liberté de choix. Plutôt que de critiquer directement leurs choix ou de s’opposer frontalement aux conseils de leur conseiller commercial, il peut être plus efficace de proposer des informations factuelles, comme les garanties de l’État en cas de défaut bancaire, ou de suggérer des alternatives en se basant sur sa propre expérience.
Par exemple, expliquer que la limite de 100 000 euros par établissement est une mesure de protection des épargnants mise en place pour éviter les pertes en cas de crise, mais qu’elle nécessite de prendre certaines précautions pour répartir ses fonds de manière optimale, peut inciter à la réflexion sans être perçu comme une critique directe.
Conclusion : Partager Sans Juger
Informer ses proches sur les risques de certains placements ou sur la nécessité de diversifier leurs avoirs est un exercice délicat. Il faut composer avec des habitudes, des perceptions de confiance, et parfois même des résistances émotionnelles. L’objectif n’est pas d’imposer son avis, mais plutôt d’apporter des éléments de réflexion qui leur permettront, peut-être, de prendre des décisions plus éclairées. En abordant ces conversations avec empathie et en se basant sur des faits concrets, il est possible d’ouvrir le dialogue tout en respectant leurs choix et leur autonomie.