Dézoom #1: France vs Irlande : Pourquoi ne pas regarder du côté de Dublin ?

Les médias traditionnels aiment comparer la France à ses voisins européens, en particulier l’Allemagne, notre partenaire économique historique. Cependant, depuis que l’économie allemande connaît des difficultés, les comparaisons s’étendent parfois à l’Italie ou à la Grèce. Mais un pays est étonnamment absent de ces analyses : l’Irlande.

Pourtant, l’Irlande affiche des performances impressionnantes, notamment en matière de gestion budgétaire, de croissance économique et dans des domaines fondamentaux pour la société comme la santé, l’éducation ou encore les retraites. Comparer ces deux modèles, à la fois fiscalement opposés et culturellement proches, offre un éclairage intéressant sur les choix économiques qui façonnent nos vies.

PIB par habitant : L’Irlande en tête de peloton

L’Irlande affiche un PIB par habitant de 91 783 $ (environ 85 000 €), largement supérieur à celui de la France, qui s’élève à 38 775 €. Ce résultat impressionnant est en grande partie dû à une fiscalité extrêmement attractive pour les multinationales, en particulier dans les secteurs technologiques et pharmaceutiques.

Cette stratégie, qui rappelle les préconisations d’économistes comme Marc Touati, mise sur une fiscalité faible pour attirer des capitaux étrangers, avec un effet direct sur la richesse par habitant. La France, à l’inverse, privilégie un modèle redistributif financé par des prélèvements élevés, qui garantit une stabilité sociale mais limite son attractivité économique.

Santé : Une espérance de vie légèrement meilleure en Irlande

L’Irlande devance légèrement la France en termes d’espérance de vie, avec 82,6 ans contre 82,2 ans. Ce résultat surprenant, étant donné les moyens consacrés à la santé en France, reflète l’efficacité relative du système irlandais.

La France offre un accès universel aux soins grâce à un financement public massif. En Irlande, les citoyens doivent souvent souscrire à une assurance privée pour accéder rapidement aux soins, ce qui introduit une inégalité selon les revenus. 60% des résidents Irlandais, sans assurance privée, peuvent accéder aux soins publics, mais ils sont souvent confrontés à des frais directs pour les consultations et les traitements, ainsi qu’à des délais d’attente plus longs. Par exemple, une consultation chez un médecin généraliste coûte généralement entre 50 et 60 euros, et une visite chez un spécialiste peut varier de 100 à 200 euros. Les Français ont directement payé 7,5 % de leurs dépenses de santé en 2023, soit environ 274 euros par habitant (hors mutuelle et sécurité sociale donc). Dans le même temps, 3 millions de Français n’ont pas d’assurance privée de type mutuelle.

Toutefois, ces deux modèles parviennent à des résultats similaires, illustrant que des dépenses élevées ne garantissent pas toujours une meilleure santé publique.

Éducation : Des performances internationales en faveur de l’Irlande

Selon le classement PISA de l’OCDE, l’Irlande surpasse régulièrement la moyenne des pays développés, notamment en lecture, tandis que la France se situe dans la moyenne, avec des écarts marqués selon les catégories socio-économiques.

L’Irlande, avec un budget éducatif plus modeste, obtient de meilleurs résultats grâce à des réformes ciblées et une pédagogie adaptée. En comparaison, la France, malgré des dépenses publiques plus élevées, fait face à des rigidités institutionnelles et des disparités croissantes. Cela questionne l’efficacité de notre modèle éducatif, pourtant largement financé par les contribuables.

Retraites : Flexibilité contre sécurité

En matière de retraites, la France et l’Irlande incarnent deux approches opposées. La France mise sur un système par répartition, avec un âge légal de départ récemment repoussé à 64 ans, garantissant une certaine sécurité pour les retraités.

En Irlande, l’âge de départ est déjà de 66 ans, bientôt 67 ans, avec un modèle basé sur la capitalisation, complété par une pension publique minimale. Ce système offre une flexibilité accrue mais expose les individus à des inégalités selon leur capacité à épargner.

Conclusion : Pourquoi ne pas s’inspirer de l’Irlande ?

Alors que l’Irlande affiche des résultats budgétaires exemplaires et des performances solides dans des domaines essentiels, elle est rarement utilisée comme point de comparaison dans les débats publics en France. Ce modèle, bien que libéral et exigeant pour les individus, montre qu’une fiscalité allégée et une gestion pragmatique peuvent générer des résultats impressionnants.

La France, en revanche, maintient une approche redistributive, plus coûteuse mais plus égalitaire, au prix d’une moindre compétitivité. Ces deux visions offrent des leçons précieuses : l’Irlande démontre qu’une fiscalité attractive peut enrichir un pays, tandis que la France rappelle l’importance de la solidarité pour préserver la cohésion sociale.

Il est peut-être temps de ne plus comparer la France uniquement à l’Allemagne ou à ses voisins en difficulté, mais de se tourner aussi vers des modèles comme celui de l’Irlande, qui fonctionnent dans les domaines qui comptent vraiment.